La discrétion imposante ! Et ce n'est pas là le moindre des paradoxes de ce monstre sacré. Reprenant la silhouette quelque peu pataude et le gabarit du HDJ 80, son illustre aïeul, le LC100 passe pratiquement inaperçu dans le flot de la circulation. Son dessin adouci, presque trop timoré ne fait pas tourner les têtes. Mais quelle présence ! Vous pouvez me croire, la vue de son impressionnante calandre envahissant le rétroviseur central d'une Twingo générera chez le conducteur de la Renault de sérieuses montées d'adrénaline !
Ni beau ni laid, notre sumo - 2,65 tonnes en ordre de marche sur la bascule ! - sait néanmoins vous accueillir à la façon des berlines de grand luxe. L'habitacle offre un espace à vivre exceptionnel. Aussi bien en largeur aux coudes (1,6 m) qu?en garde au toit (96 cm), il surclasse la concurrence dans ce domaine. Et puis, il y a cette impression irréprochable de finition, de qualité des plastiques, moquettes, cuirs ou tissus qui nous confirment que ce Toyota, comme les autres 4X4 du constructeur d'ailleurs, a été conçu pour durer longtemps.
Enfin, il arbore une planche de bord affinée résolument moderne et bien pensée. Articulée autour d?un large bloc central, celle-ci regroupe toute l'instrumentation et l'équipement nécessaire à la conduite. Et même bien au-delà, car la liste n'en finit plus : ABS, double airbag, ceintures trois points à enrouleurs sur toutes les places avec prétentionneurs, verrouillage centralisé avec télécommande, antivol immobilisateur électronique, vitres teintées électriques anti-pincement, rétroviseurs asphériques à réglage et dégivrage électrique, hauteur des phares réglable, volant également réglable électriquement en hauteur et en profondeur s'il vous plait, cruise control, climatisation automatique, double prise auxiliaire 12 volts.., auxquels s?ajoutent sur notre VXV, les sièges chauffants, la sellerie cuir complète, les deux sièges supplémentaires arrière portant à sept le nombre de places disponibles, la mémorisation des réglages du fauteuil conducteur, des rétros extérieurs et du volant, sans oublier le toit ouvrant ou le lecteur 6 CD accouplé à une excellente chaîne audio 6 HP, Ouf !
Extérieurement, rien non plus ne manque à l?appel, des jantes alliage 16 pouces, aux marchepieds qu?il faudra quand même laisser au garage si l?on veut pratiquer l?off-road l?esprit tranquille, aux lave phares. Aucun autre 4X4 ne mérite mieux l?appellation de vaisseau amiral !
UN TANDEM "MOTEUR TRANSMISSION" REUSSI
Techniquement, ce Land Cruiser est bâti comme on aime. Un solide châssis séparé à longerons et traverses supporte une carrosserie en acier haute résistance dont la "peau" est traitée anti-corrosion et reçoit à l?avant un train à roues indépendantes (double triangulation) ainsi qu?un essieu rigide arrière guidé par quatre tirants longitudinaux (+ barre Panhard) et doté de ressorts hélicoïdaux. Sur le VXE, des amortisseurs hydrauliques (système Skyhook TEMS) réglables manuellement ou automatiquement selon le terrain, remplacent les traditionnels modèles télescopiques.
Le moteur est le fameux 1HD-FTE six cylindres en ligne à bloc et culasse en fonte turbo diesel à injection directe simple arbre àcames en tête 24 soupapes (entraînées par courroie crantée et culbuteurs), muni d?un intercooler. Affichant 4164 cm3 (alésage x course de 94 X 100 mm), il développe 204 chevaux réels à 3400 t/mn pour un couple fort généreux de 430 Nm disponibles dès 1400 tours et jusqu?à 3400 t/mn ! Ce groupe est placé sous une gestion électronique intégrale via un ordinateur (TCCS) qui contrôle un grand nombre de paramètres (avance à l?injection, ralenti, qualité du gazole, recirculation des gaz d?échappement, etc.) afin d?optimiser son fonctionnement. Ce 1HD-FTE est associé, soit à une boîte mécanique cinq vitesses (c?est la H151F du HDJ 80 mais renforcée) ou dans le cas qui nous intéresse, à une automatique 4 rapports (A442F) nettement mieux appropriée au moteur avec trois différents modes de passage :
Bien entendu, la transmission est une intégrale permanente qui transite par un transfert central à deux rapports que l?on peut bloquer à volonté en gamme longue, automatiquement en courte.
CHAUD DEVANT !
Mais il est grand temps de prendre la route ! Comme il fallait s?y attendre, la position de conduite se cale d?emblée sur le plus que parfait. Le contraire aurait été étonnant, vu la pléiade des réglages. Autre conséquence, toutes les commandes tombent naturellement sous la main et le pied. De même, le tableau de bord contribue à l?ambiance très "saloon car". Contact. Magique, le volant s?abaisse et se positionne "pile-poil" à votre pré-réglage mémorisé : il remontera dès la clé du Neiman enlevée, afin de faciliter votre descente sur terre ! C?est à peine si l?on perçoit le feulement doux du six cyIindres. À la première sollicitation de la pédale de droite.., il ne se passe pas grand-chose ! La gestion électronique de l?accélérateur combiné au convertisseur de la boîte auto quelque peu paresseux gomment tout effet d?instantané. Le HDJ s?ébroue donc toujours avec un certain temps de réponse, mais ensuite c?est le décollage assuré ! Et, bon sang que ça pousse ! Les 204 chevaux sont bien là, mais surtout ils sont épaulés par le couple phénoménal dès les plus bas régimes. Un véritable tracteur qui vous permet sur autoroute de "cruiser" relax le 150 compteur autour de 2000 tours, avec bien entendu tout le bénéfice côté pompe. Et là, bonne surprise, le Station Wagon sait se faire petit avec un 13l/100 km de moyenne stabilisée. Nous avons toutefois atteint sur un bon 17 / 18 litres durant notre test mené bon train "on" et "off" road. Quand même assez remarquable.
Lorsque puissance se conjugue avec une transmission intégrale offrant une motricité sans faille, inutile de préciser que les reprises et les accélérations sortent de la même (bonne) veine. Avec entre autres, un remarquable 12"3 pour passer de 0 à 100 km/h, ou 10"2 de 40 à 100 km/h en Drive. Ce qui laisse par exemple un Nissan Patrol GR 3.0 VDI, autre mastodonte du même type, à plus de deux secondes pleines sur ces mêmes valeurs. Et encore, la boîte au demeurant bien étagée pêche par son manque d?entrain. Pas catastrophique, mais depuis peu, il y a mieux ailleurs notamment chez Mercedes et BMW. Autre bon point, sa capacité de remorquage portée à 3,5 tonnes.
UNE MOTRICITE SANS FAILLE
Mais, ce gros coeur s?exprime d?autant plus que Toyota a optimisé les liaisons au sol en adoptant un train avant à roues indépendantes, une démarche inaugurée en 1996 avec l?actuel Land Cruiser 90/95. Certes sur bitume, le guidage est bien meilleur qu?avec un traditionnel pont rigide, mais ce choix technique sera en revanche pénalisant en tout-terrain intensif car beaucoup moins robuste.
Concrètement, cette liaison au sol mixte s?avère néanmoins une réussite totale qui vous fait complètement oublier la taille et le poids de la bête. Ainsi, le Station Wagon peut s?inscrire parfaitement en courbe sans roulis ni tangage parasites. Il garde son cap en toutes circonstances et nous avons été, une fois encore, très impressionnés par les vitesses de passages en virages serrés ou non. La direction, par ailleurs dotée d?un assez faible rayon de braquage synonyme d?une bonne maniabilité compte tenu du gabarit, ne laisse rien remonter au volant. Le guidage hyper précis des roues régalera les amateurs de conduite rapide d?autant que les pneumatiques Michelin LTX sur notre véhicule d?essai se révèlent excellents et bien supérieurs aux Dunlop Grandtrek qui sont également disponibles en première monte. Énième satisfaction, le freinage, puissant, endurant et dont l?ABS bien dosé a la bonne idée de se déconnecter automatiquement en gamme de vitesses courtes. Que l?on se rassure, ce tempérament finalement assez joueur ne remet nullement en cause le confort. De par le volume disponible, la parfaite insonorisation exempte de tous bruits aérodynamiques ou mécaniques et le maintien exemplaire des sièges, le LC100 est tout simplement royal. Vraiment, peu de véhicules peuvent aujourd?hui rivaliser sur ce plan.
BAROUDEUR DANS L'AME
Sur pistes rapides, même constat d?efficacité : le Station Wagon roule vite, très vite, voire trop vite ! Il s?agira de savoir modérer son allure et se souvenir qu?une triangulation avant aussi sérieuse soit-elle; ne possédera jamais la robustesse d?un pont rigide. Compte tenu de sa musculature body-buildée, on se gardera de l?entraîner sur des zones trop trialisantes. La hauteur de la position de conduite pénalise d?ailleurs la vue du terrain et il sera plus sage de bien reconnaître les difficultés à pied avant de s?engager.
Le HDJ 80 possédait trois blocages de pont et des débattements plus que conséquents. Sur ce point, sa relève lui rend la main, car notre LC100 demeure plus raide et ne peut s?aider de son bloc avant, il en est dépourvu !
Cela dit, il motrice largement au-dessus de la moyenne, son blocage arrière (disponible sur les rapports courts) remplissant parfaitement son rôle. Il faut l?avouer, ses limites en tout terrain se situent assez loin compte tenu de ses impératifs de taille et de poids. Avec de bons pneus cramponnés (on "passe" facilement du 235/ 85 R16), il saura même se transformer en un redoutable franchisseur avec, comme on l?a évoqué, toutes les précautions à prendre.
La réduction est parfaite et permet d?enrouler tous les dénivelés. Le HDJ 100 se moque aussi de toutes les ornières profondes ou traîtresses, bosses malines ou trous maléfiques.
Pour l?avoir testé en Tunisie, nous pouvons également affirmer que le sable ou les dunes ne lui font pas peur pour peu que l?on maintienne une allure assez soutenue. Royal, impérial...
Bref, ce Land Cruiser représente toujours selon nous, ce qui se fait de mieux dans la famille des gros 4X4 ultra polyvalents, sachant marier hautes performances, confort, espace, luxe, capacités de traction, etc. Une sorte de véhicule universel qui relègue les meilleurs SUV loin derrière, tant ses prestations hors du goudron font la différence.
Avec lui, on se sent capable d?avaler des milliers de kilomètres, de partir au bout de la planète. Il faut un premier en tout, c?est lui !
Hélas, tout ceci se paie. Et là, il ne faut pas pointer aux Assedic !
Reste que le chèque à signer se justifie pleinement et constitue une sorte d?investissement automobile à plus ou moins long terme qui se retrouvera fatalement, comme pour le HDJ 80, au moment de la revente.
Texte et photos extraits de "Passion 4x4" n°82 - novembre 2001
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